Si le mot sport vient du mot « desport » qui signifie amusement, la course à pied est un sport qui ne peut être envisagé sans une de ses composantes essentielles : la compétition. Comme le présente les psychologues OCCHINI et TERRENI (2000), « la compétition répond à l’exigence spontanée de l’homme de se mesurer avec la nature, avec les autres et avec lui-même ». Elle est orientée vers un but : dépasser un niveau de performance, atteindre un objectif, et exige donc une participation physique et psychologique totale de la part de l’athlète.
Mais pourquoi en compétition, je veux toujours en garder sous le pied ?
La peur
La peur de mal faire, la peur d’échouer, la peur de décevoir : la peur est souvent la principale raison pour laquelle nous nous érigeons des barrières psychologiques et nous en gardons sous le pied. Paradoxalement, la peur de réussir peut aussi être un facteur favorisant le fait de ne pas tout donner en compétition ou de ne pas prendre part à des compétitions (déclarer forfait).
Dans tous les cas, il s’agit là de croyances « limitantes ». Non pas que nous soyons des looseurs, mais ceux sont des situations dans lesquelles, par peur de ne pas être à la hauteur de nos espérances, de ne pas être dans la capacité de réaliser telle ou telle performance, nous en gardons sous le pied.
Le stress
Le stress peut être aussi une entrave lors de la compétition. Au niveau physiologique, il peut aller de la tension musculaire à la nausée en passant par des palpitations, une sudation excessive voire une tachycardie. Au niveau psychologique, tension, agitation, crispation, irritabilité se bousculent.
Souvent, au lieu de nous concentrer essentiellement sur des objectifs technique ou tactique comme bien s’échauffer, bien se vêtir en fonction du temps et bien s’alimenter, nous avons tendance à nous laisser envahir par la pression, par l’enjeu, guidé par toutes ces peurs dont nous avons parlé plus haut. Un surplus de stress nous fait perdre concentration, attention voire nous paralyse. Ainsi, nous levons le pied voire appuyons sur le frein et notre performance en devient altérée.
Les stratégies d’auto-handicap
Lequel d’entre nous ne s’est jamais dit sur la ligne de départ : « de toute façon, je vais y aller tranquille, je vais pas la faire à bloc ». Personne ! Nous avons tous eu, un jour ou l’autre, ce discours avec nos amis de club ou nous même. Nous faisons cela car, en cas de mauvais résultat, nous pouvons toujours mettre cela sur le fait de ne pas avoir été à bloc. Mieux encore, en cas de bonne performance, cela peut encore plus servir notre égo : « oui c’est bien mais j’aurai pu faire mieux car j’en ai gardé sous le pied ». Ces stratégies d’auto-handicap nous rendent prudent et nous ont pour but de nous préserver en cas d’échec.
Mais qu’est ce que je risque au fond si je cours à fond ?
La compétition représente « une situation spécifique dans laquelle l’athlète s’efforce d’atteindre un but ou un modèle d’excellence qui peut être ensuite évalué en terme de succès et d’échecs, par soi ou par autrui » (Thill, 1999). Le risque, si nous pouvons parler de risque, c’est d’échouer, de ne pas réaliser la performance que nous avions visé et ainsi de ne pas être satisfait. La pratique sportive participe à la construction identitaire de chacun de nous et notamment améliore l’image que nous avons de nous, les caractéristiques du contexte compétitif peuvent, d’un autre côté et lors d’une mauvaise performance, égratigner cette image positive que nous avons de nous.
Développée par le psychologue canadien Bandura en 1977, cette théorie, appelée théorie de l’efficacité personnelle perçue, correspond au jugement personnel porté par un athlète sur ses propres capacités à accomplir un certain niveau de performance. Une bonne performance contribue à augmenter notre sentiment de compétence. Nous manifestons généralement de la joie, nous ressentons de la fierté et une grande satisfaction personnelle. Lors d’une mauvaise performance (mauvais chrono, mauvais classement, abandon), le risque est de se sentir moins compétent. Nous sommes tristes, le doute s’installe et notre estime personnelle est menacée. Lever le pied devient alors l’assurance tout risque contre un éventuel sentiment d’incompétence : « je n’ai pas couru à fond, j’aurai pu faire mieux si ça avait été le cas…car fondamentalement je vaux mieux que ça ».
Enfin, la compétition demande une intensité d’effort maximale et nous confronte à des expériences corporelles qui peuvent se montrer négatives, dispensatrices de sensations de fatigue ou de douleur.
Quelle que soit le type de compétition, ces risques sont présents, bien que différents, et lever le pied en compétition est un bon moyen de ne pas y être confronté.
Mais que risque-t-on vraiment à être confronté à ces risques et à les vivre ? Est-ce que l’on risque vraiment quelque chose de grave ? La réponse est non bien évidemment ! N’a-t-on pas les moyens de faire face à la situation ? Oui bien sûr ! La raison de notre anxiété est-elle vraiment valable ? Non ! Cette stratégie de faire face en se posant les bonnes questions et en y apportant les bonnes réponses, au même titre que d’autres techniques comme la visualisation, l’auto-persuasion, la visualisation nous permettent d’intervenir sur notre évaluation de la situation, d’en limiter les enjeux pour nous donner à 100% et sans retenue.
Quels bénéfices je tire d’une compétition à bloc ?
La compétition est majoritairement, pour tout coureur, le moyen de se surpasser, de progresser, et d’atteindre l’objectif fixé. Les bénéfices sont multiples !
Le meilleur des entraînements
La compétition, de part l’intensité et la durée d’effort qu’elle demande, est le meilleur des entraînements et vous permettra d’obtenir toutes les adaptations positives afin de devenir plus performant. Par exemple, en course à pied, pour un objectif 10 km, il sera profitable de courir un 5 km à bloc 2 à 3 semaines avant un 10 km. Pour un objectif marathon, un 10 km 6 à 8 semaines avant la date objectif puis un semi-marathon à 3 ou 4 semaines seront à coup sûr un tremplin pour réaliser l’objectif le jour J.
Les courses me permettent d’atteindre des intensités d’effort rarement atteignables sans les conditions de compétition. Le but étant chaque fois de « choquer » l’organisme pour le préparer et l’habituer à ce niveau d’effort. Les 2 premières sont généralement laborieuses et difficiles, mes perfs s’améliorent ensuite au fur et à mesure pour atteindre un pic sur les 2 dernières. Toute la difficulté consiste à bien récupérer entre chaque course, tout en continuant à s’entrainer… Le manque de compèt se fait alors sentir à l’approche du jour J, l’envie de tout donner pour se dépasser. Mais l’important reste de toujours prendre beaucoup de plaisir. 🙂
Les compétitions permettent d’atteindre des intensités d’effort qui ne sont pas atteignables sans le contexte de la compétition. Le but étant à chaque fois de choquer l’organisme pour le préparer et l’habituer à ce niveau d’effort. Si les premières peuvent vous sembler laborieuses et difficiles vos performances s’amélioreront à coup sûr au fur et à mesure des courses pour atteindre le fameux pic de forme lors de la compétition objectif. Veillez tout de même à bien récupérer entre deux compétitions et à soigner votre alimentation avant et après chaque événement.
Prédire vos performances
Si les différents tests existants en laboratoire ou sur le terrain peuvent fournir des données importantes pour prédire une performance, une compétition à bloc reste le meilleur test d’évaluation et permet d’estimer au mieux une performance future et donc de s’y préparer. A titre d’exemple, pour un coureur à pied réalisant un temps de 35 min 20 sur 10 km, on peut estimer un temps sur marathon de 2 h 52 min 30 sec et donc d’en tenir compte pour choisir les allures d’entraînement spécifiques avant tout et non spécifiques.
Développer des qualités mentales gagnantes
Tout donner en compétition va vous permettre de développer les qualités mentales indispensables à la performance : engagement, motivation, volonté, courage, exigence (envers soi-même, sa préparation, son matériel), agressivité dans le bon sens du terme (capacité à vouloir être meilleur voire le meilleur), concentration, application…Le contexte compétitif, en exigeant le meilleur de vous, vous permettra de développer ces qualités en et vous rendra plus fort, plus conscient de vos possibilités et de votre potentiel ; en un mot plus confiant et pourquoi pas plus ambitieux !
Du plaisir
Si la compétition peut se montrer difficile, dure, stressante sur le moment, elle est aussi un plaisir et un bonheur. Le plaisir et le bonheur de progresser, d’acquérir des compétences, de s’améliorer, de se remettre en question, de se prouver des choses, de se lancer des défis, de préparer la compétition objectif. Elle apporte son lot de partage, de joie et de triomphalisme.
Alors, la prochaine fois que vous participez à une compétition, donner le meilleur de vous-même et ne vous économisez pas. Les bénéfices dépassent les risques, et de loin !