Traumatologie de l’épaule, cause et prévention

Article co-écrit avec Lyvio Cavalier, étudiant en Master STAPS à l’Université Paris Est Créteil, spécialiste de volley ball

De nombreux sports sollicitent les épaules de façon intense. Par exemple au volley, le joueur utilise cette articulation de manière dynamique (service, smash), statique (réception) ou par réaction « réflexe » (défense).
L’épaule est ainsi soumise à de très fortes contraintes mécaniques qui peuvent entraîner des traumatismes.

  • Quelles sont les principales pathologies traumatiques de l’épaule ?
  • Comment les prévenir ?
  • Quels exercices peut-on proposer à titre préventif ?

Rappels anatomiques de l’articulation de l’épaule

L’épaule est un ensemble composé de cinq articulations :

  1. L’articulation scapulo-humérale, qui relie l’os du bras à l’omoplate. C’est une articulation mobile dans trois plans.
  2. L’articulation acromio-claviculaire, qui relie la clavicule à l’omoplate.
  3. L’articulation sterno-claviculaire, qui relie le sternum à la clavicule.
  4. L’articulation scapulo-thoracique, qui est en fait un plan de glissement entre l’omoplate et le grill costal.
  5. La bourse séreuse sous-acromio-deltoïdienne, une « fausse articulation ».

Principaux os de l'épaule

Les éléments stabilisateurs passifs et actifs sont :

  • les capsules articulaires ;
  • des ligaments ;
  • un bourrelet fibro-cartilagineux ;
  • les muscles de la coiffe des rotateurs, sous-scapulaire, infra-épineux, petit rond, supra-épineux.

Muscles de la coiffe des rotateurs de l'épaule

Pathologies traumatiques de l’épaule du volleyeur

Certains spécialistes les classent selon leur gravité :

  • instabilités et douleurs ;
  • conflits et tendinopathies ;
  • lésions neurologiques micro-traumatiques.

Ces pathologies sont décrites ci-dessous. Il existe d’autres classements, selon leur cause, leur localisation, les tissus touchés…

L’épaule instable et douloureuse

Il s’agit d’une lésion des ligaments de l’épaule (ligament gléno-huméral inférieur le plus souvent) qui, déchirés, ne peuvent plus remplir leur rôle stabilisateur. L’instabilité douloureuse de l’épaule peut être due à :

  • des surfaces articulaires insuffisamment congruentes ;
  • un geste d’une trop grande amplitude ;
  • un mouvement réalisé avec une vitesse très élevée ;
  • une musculature insuffisamment développée ;
  • une faible proprioception ;
  • une technique gestuelle dégradée.

Ce problème est souvent banalisé lorsque le patient est capable de replacer son épaule lui-même, mais cela peut entraîner une luxation récidivante de l’articulation. Non traitée, cette instabilité peut dégénérer en une véritable infirmité. La répétition des luxations va éroder l’os à cause du frottement de la tête humérale contre le bord antérieur de la glène de l’omoplate (scapula). L’usure de l’os augmente les risques de luxation.

Les conflits et tendinopathies

Leurs causes peuvent être classées en deux catégories :

  1. celles liées à la sollicitation tendineuse ;
  2. celles liées à l’usure tendineuse à cause d’un conflit entre un tendon et un élément anatomique.

Le volleyeur peut être sujet au conflit sous-acromial (ligament coraco-acromial et acromion) et/ou au conflit postéro-supérieur (bord postéro-supérieur de la glène et partie postérieure du supra-épineux et antérieure de l’infra-épineux).

Conflit postéro-supérieur

Cette figure illustre par exemple le conflit entre la face profonde de l’insertion du sus-épineux et le bord postéro-supérieur de la glène en position d’armer.

Les lésions neurologiques micro-traumatiques

Selon Ferretti & Col. (1987), les lésions neurologiques sont très fréquentes dans les sports de lancer comme le volley-ball. Elles touchent principalement le nerf thoracique long (grand dentelé) et le nerf supra-scapulaire (sus-scapulaire).

Prévention par l’entraînement

La prévention passe par :

  • la correction du geste technique ;
  • le renforcement musculaire ;
  • le travail de proprioception.

Ceci ne doit pas faire oublier l’entretien voire l’amélioration de la mobilité par les étirements.
La correction du geste technique implique que le sportif modifie sa manière de faire, ce qui est souvent très difficile. Mais, cela peut dans certains cas permettre de réduire considérablement les contraintes exercées sur l’épaule. Ceci est valable en particulier dans le cas de lésion du nerf supra-scapulaire. Par exemple au volley, quand le joueur croise son attaque, il doit diminuer l’adduction horizontale en fin de geste. En effet, cette adduction horizontale favorise un étirement du nerf. Le joueur devra alors privilégier des attaques dans l’axe. Pour rendre possible cette modification du geste technique, on demandera au joueur une course d’élan perpendiculaire plutôt que parallèle au filet. Cela aura pour effet de limiter cette contrainte en adduction.
Le renforcement musculaire et le travail de proprioception jouent également des rôles préventifs déterminant. L’objectif du travail de proprioception est de stimuler l’activité des muscles profonds, qui assurent l’ajustement fin du geste. Le principe est de varier les situations pour stimuler les capacités de stabilisation articulaire assurée par le système neuromusculaire, en statique et en dynamique. En ce qui concerne l’épaule du volleyeur, il s’agit d’abord de solliciter les muscles de la coiffe des rotateurs. En effet, ces muscles profonds assurent également la coaptation de l’articulation scapulo-humérale donc la stabilité de l’épaule. Ceci ne dispense pas de renforcer le deltoïde, en particulier son faisceau antérieur qui est rotateur interne du bras et son faisceau postérieur qui est rotateur externe du bras.
Les formes de contraction utilisée lors de la musculation devront respecter les contraintes réelles de l’épaule lors du smash :

  • le renforcement isométrique pour des fixateurs de l’omoplate. En effet, l’armé se termine par une phase statique ;
  • le renforcement concentrique pour les rotateurs internes ;
  • le renforcement excentrique pour les rotateurs externes.

Pour l’entretien voire l’amélioration de la mobilité, deux formes d’étirements devront être réalisées. Des étirements passifs en fin de match, d’entraînement ou de séance de musculation. Des séances dédiées aux assouplissements en appliquant la méthode contracté-relâché-étiré.

Quelques exercices de musculation préventifs

Renforcement des déltoïdes

Renforcement des déltoïdes

Debout dans une position stable (pieds au niveau des épaules et dos droit), une haltère dans chaque main en prise neutre (photo de gauche), il s’agit d’élever les bras tendus latéralement jusqu’à ce qu’ils soient parallèles au sol (photo de droite).

Muscles rotateurs externes

Muscles rotateurs externes

Allongé sur le côté sur un banc, bien calé, un genou plié pour ne pas basculer, un haltère dans la main en prise neutre, le coude plié à 90 degrés et serré près du corps (photo de gauche), il s’agit d’effectuer une rotation externe de l’épaule (photo de droite).

Muscles rotateurs internes

Muscles rotateurs internes

Debout dans une position stable, les pieds écartés de la largeur des épaules, de profil à une poulie réglée à la hauteur de main, coude fléchi à 90 degrés (photo de gauche), il s’agit d’effectuer une rotation interne de l’épaule. Le coude reste serré près du corps (photo de droite).

Muscles élévateurs

Muscles élévateurs

Debout dans une position stable, les pieds écartés de la largeur des épaules, les mains en prise pronation espacées d’une largeur légèrement supérieure à celle des épaules. Les coudes pliés à 90° (photo de gauche), il s’agit d’effectuer une rotation externe de l’épaule autour de l’axe des bras (photo de droite).

Conclusion

La sollicitation de l’épaule à des vitesses très élevées et dans des amplitudes articulaires inhabituelles, de manière statique ou brutale, peut générer des traumatismes.
La cause d’une douleur de l’épaule dans un sport de lancer est parfois difficilement identifiable car les structures potentiellement lésées sont nombreuses et, dans certains cas, plusieurs éléments (nerf, tendon…) peuvent être touchés. Un examen clinique complet et précis est nécessaire afin d’adopter une conduite thérapeutique adaptée.
Pour l’entraîneur, un travail de préparation physique adapté doit donc aussi remplir un rôle préventif. Il permettra ainsi de réduire les risques de traumatismes par un renforcement musculaire ciblé mais également grâce aux étirements et à un réapprentissage du geste technique.

Références :

Coudreuse J.-M., Dupont P. (1992). Pathologie du nerf sus-scapulaire dans la pratique du volley-ball. J traum Sport. 9 : 55-62.
Coudreuse J-M et Parier J. (2003). Pathologies du lancer : l’épaule et le coude. Médecins du sport. 62 : 15-27.
Ferretti A, Cerullo G, Russo G. (1987). Suprascapular neuropathy in volleyball players. J Bone Joint Surg 1987 ; 69 : 260-63.
Royer J-L. (2009). Quelles priorités pour l’épaule du volleyeur ? Stade Poitevin Volley-Ball.
Wieczorek V. (2011). L’épaule du sportif. Oignies.

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