C’est un livre pas comme les autres que propose Dominique Cado aux éditions Amphora. Un partage d’expérience plein d’humour et de générosité, à l’image de son auteur. Ce coureur amateur a d’abord décidé de se mettre au service des autres à travers un site internet www.lalignebleue.net, puis par l’intermédiaire de ce livre qui apporte des réponses aux questions que se posent tous les coureurs amateurs qui cherchent à progresser dans leur pratique sportive.
Dominique Cado offre au lecteur de nombreux conseils issus de son propre parcours de vie. Une vie de coureur débutée à près de cinquante ans. Une histoire qui pourrait être celle de millions d’adeptes de l’effort. Celle d’un coureur ordinaire.
– Comment définir la ligne bleue ?
La ligne bleue, c’est la ligne que l’on retrouve sur les grands marathons comme les marathons de Paris ou de Berlin. Cette ligne bleue est peinte au sol sur les 42,195 km du parcours. Si on court sur la ligne bleue, on parcourt 42,195 km et pas plus. Le marathon est la course la plus longue qui se court vite.
– Ce livre est un beau partage d’expérience.
C’est un beau partage d’expérience d’un coureur « lambda », un coureur comme un autre qui a découvert la course à pied assez tard. Je n’ai pas écrit un livre technique sur la course à pied. Je lis beaucoup de livres de course à pied. Ces livres sont souvent écrits par des champions qui peuvent faire rêver ou des spécialistes. Nous sommes huit millions de coureurs en France et nous ne sommes pas tous des champions ou des spécialistes. J’avais envie de faire passer le message d’un coureur amateur comme moi. C’est un livre qui pourrait être écrit par n’importe quel coureur ou coureuse du dimanche et qui donne des conseils pour faciliter la progression d’une personne qui choisirait de se lancer dans la pratique.
– Quand et comment avez-vous pris la décision de chausser des baskets pour courir ?
Je n’ai pas pris cette décision seul. Je suis un ancien footballeur qui n’aimait pas courir sans objectif et sans ballon. Lorsque l’on joue au football, la course à pied se résume à faire quelques tours de stade pour s’échauffer.
Pour moi, la course à pied est une histoire de rencontres. Celle d’un médecin qui m’a fait peur un jour en me conseillant sérieusement de prendre en main ma santé pour ne pas mourir trop vite et trop jeune. Je fumais beaucoup et je mettais ma santé en danger. C’est aussi la rencontre avec un cardiologue lors d’un test à l’effort. Ce cardiologue, qui est ensuite devenu un ami, était marathonien. Il m’a accompagné lorsque je me suis lancé dans le pari de courir un marathon, un peu plus d’un an après avoir décidé d’arrêter le tabac.
Je n’ai donc pas choisi de courir par envie ou par plaisir mais juste par nécessité médicale. C’est aussi une belle source de motivation de courir pour retrouver la santé ou pour ne pas mourir trop jeune. Lorsque je me suis mis à courir, le plaisir n’était pas forcément au rendez-vous au début. Le plaisir vient avec l’apparition des endorphines que l’on sécrète au bout d’environ 45 minutes de course. Il vient avec ce bien-être que l’on ressent lorsque l’on a effectué une belle séance d’endurance. Après, on ne peut plus se passer des effets produits par l’effort. Cela devient une addiction. J’ai donc remplacé 40 cigarettes par jour par 50 kilomètres de course à pied par semaine.
– Vous avez décidé de vous lancer dans une deuxième vie ?
C’est vraiment une deuxième vie. Une vie différente de la première. Comme le disait Confucius : « On a tous deux vies, la deuxième commence lorsque l’on se rend compte que l’on n’en a qu’une ». Cela résume mon parcours dans la course à pied. Ma deuxième vie a commencé avec la course à pied. Cela aurait pu être avec une autre activité comme la natation ou autre chose. Il fallait faire quelque chose.
– Vous avez très vite décidé de vous lancer dans l’aventure du marathon.
J’ai commencé par courir quelques tours de stade près de chez moi. J’allais trop vite donc je ne courais pas très bien comme la plupart des gens qui décident de courir et qui arrêtent ensuite parce que c’est trop difficile. Il est essentiel de débuter la course à pied de manière progressive. Au bout de la troisième séance, je suis rentré chez moi et j’ai dis à mon épouse que j’avais décidé de courir le Marathon du Mont-Saint-Michel pour mes cinquante ans l’année suivante. Je n’étais pas capable de courir deux kilomètres et je prévoyais d’en courir vingt fois plus. J’avais besoin d’un objectif. Je suis peut-être un âne avec une carotte mais j’avais besoin de cela dans la vie. Je pense qu’il est important de se fixer des objectifs.
– Vous avez suivi ensuite une progression rapide. Peut-être trop rapide.
Je ne conseille pas à tout le monde de courir trois marathons en dix mois. C’est vrai qu’au départ du troisième marathon, c’était à Paris, j’ai ressenti une certaine lassitude car c’était trop en peu de temps. Durant ces dix mois, j’ai suivi 36 semaines de préparation pour courir ces trois marathons. Soit douze semaines de préparation par marathon à raison d’au moins quatre séances par semaine. Je savais que je faisais des bêtises mais je pensais que je pouvais le faire. J’ai ensuite beaucoup réfléchi à cette situation et j’ai compris que c’était trop. Je remplaçais la cigarette par le kilomètre. Des coureurs anonymes ne doivent courir qu’un marathon par an. C’est ce qui est conseillé par le corps médical.
– Et puis ensuite, vous continuez dans l’escalade de l’effort.
C’est mon défaut. Quand je lis un livre, plus il est épais et plus je sais que je vais me régaler. J’aime les livres de mille pages et non de cent pages. C’est le même concept pour la course à pied. J’aime aussi tenter des expériences et je l’ai fait sur une bonne dizaine d’années. Je me suis lancé dans des événements de plus en plus longs.
Et il m’est arrivé d’échouer dans ces événements et de ne pas atteindre l’arrivée. Il est essentiel d’être bien préparé. On ne peut pas toujours préparer les courses avec la vie familiale, professionnelle… Donc je me suis « ramassé la tronche » à plusieurs reprises. Il faut trouver un équilibre avec sa vie personnelle. La course à pied est aussi une aventure familiale.
– Aujourd’hui le partage s’appuie sur un accompagnement des autres.
J’ai besoin de partager et de transmettre. Je recherche juste l’échange avec les gens qui en ont besoin, et leur apporter très vite des conseils, cela permet de leur faire gagner du temps. Je ne veux plus perdre de temps dans ma vie et je cherche à en faire gagner aux coureurs qui se lancent. Je l’ai mis en application dans mon métier de formateur en cuisine. C’est ensuite à chacun de mettre en place son projet en faisant ce qu’il veut. Pas ce que je veux.
– Le livre est très ciblé et très pratique.
Je ne cherche pas à dire tout mais je raconte l’essentiel pour éviter les bêtises. Chacun peut ensuite approfondir. Je le fais aussi sur mon site internet avec 300 visites par jour. J’ai construit ce livre pour qu’il soit pratique avec un ton sérieux sans me prendre au sérieux.
– Il y a un peu de technique mais sans trop de détail.
Les lecteurs n’ont pas besoin de plan de préparation ou de détails techniques, scientifiques, physiologiques. Il est important de connaître sa VMA, c’est-à-dire son potentiel physique à travers sa Vitesse Maximale Aérobie. On ne peut pas courir un marathon en 3h30 si on n’en a pas les capacités. Nous ne sommes pas tous nés sur la même planète, c’est aussi ce que dit la VO2 max de chacun. Cette capacité à consommer l’oxygène, à la faire circuler dans les veines et à la transmettre aux muscles qui travaillent n’est pas la même pour tous. Nous sommes tous différents. Mais il est aussi important de bien respirer et de développer son endurance à travers des séances spécifiques. Toutes les séances peuvent être de qualité mais il est important de conserver la séance d’endurance. Cette séance représente 70% de l’entraînement hebdomadaire. À travers mes recherches dans la course à pied, il est aujourd’hui évident que l’Homme est l’animal le plus endurant de la Terre. Mais il n’est pas fait pour courir lentement.
– La course à pied c’est avant tout un moyen de faire de belles rencontres.
Exactement ! Lorsque je cours mon deuxième Marathon de Paris, je rencontre quelqu’un pour qui c’est le premier, je décide alors de l’accompagner jusqu’à l’arrivée en jouant le meneur d’allure pour lui permettre de courir ce marathon en moins de 4 heures. Je suis heureux parce qu’il a couru son premier marathon en 3h59. C’est une belle satisfaction aussi pour moi. Ce coureur était en larmes à l’arrivée et il ne savait pas comment me remercier. Ce sont de grands moments de partage.
J’ai aussi des coups de gueule envers les donneurs de leçons qui ont fait le Marathon des Sables, et qui, devant mes yeux pendant l’Ultra-Marin, jettent leurs déchets n’importe où et n’importe comment dans la nature.
Il y a la défense d’un esprit dans ce livre. Un esprit de respect de la nature mais aussi de respect du bénévole qui est présent sur les courses. Il faut remercier ces personnes qui, par leur présence, permettent d’organiser de belles courses. Et quand je vois des coureurs crier sur ces bénévoles parce que la bouteille d’eau n’arrive pas assez vite, cela n’est pas possible ! Il faudrait plutôt les remercier. Il faut respecter les gens qui sont présents pour que le plaisir du coureur s’accomplisse.
– Et puis on peut aussi courir pour les autres.
Ce qui m’a aussi marqué, c’est la joëlette. Courir avec des enfants malades pour leur permettre de vivre de belles expériences, c’est formidable. C’est aussi une belle expérience de partage lorsque l’on court pour les autres en poussant une joëlette, en voyant le sourire des enfants handicapés. C’est un sentiment de bonheur de prêter ses jambes à des enfants qui ne peuvent pas courir.
Le mot important pour moi, c’est le mot « partage ». C’est un mot qui résume bien ma vie.
Propos recueillis par Eric COUTARD.
Pour en savoir plus :
La ligne Bleue de A à Z
Dominique CADO
Editions Amphora